03/05/2006

Politique 2.0 à un an de la présidentielle

Author: Romain Dehaudt, Head of Revenue & Operations

Deux mois après mon dernier point et un Netizen #1 consacré au blogging politique, à un an d’une présidentielle dans le cadre de laquelle on attend que le réseau soit un terrain de combat et de débat central, il est intéressant de noter deux ou trois choses.


D’abord, dans la lignée des constats du RTGI de l’Université de Compiègne, ce ne sont pas les politiques qui mènent le bal en ligne, ni les journalistes, ce sont les “Analystes”.
Dans ce registre, j’observe avec intérêt Debat2007. Matthieu Courtecuisse y développe une réflexion sur l’interactivité au coeur de l’élection des plus pertinentes, mais le plus révélateur est ailleurs, dans la dichotomie de la barre à gauche entre ceux qui représentent “le débat en ligne” et “les politiques”. La composition des premiers, peuplée d’observateurs, journalistes, personnalités de la société civile et blogs collectifs est assez révélatrice.
Je ne m’étendrait pas sur l’abus de positionnement payant, phénomène déjà banalisé.
L’autre chose intéressante, c’est comment le réseau produit toute sorte d’indicateurs nouveaux, notamment ceux basés sur le “bruit médiatique”. Loïc Le Meur nous en a servi quelques exemples grâce à BlogPulse, le RTGI, nous propose carrément un Tendançologue. On peut aussi jouer avec Alexaholic. Au-delà de ces jouets, on devrait assister dès les programmes connus à une floraison de sites et d’outils de comparaison. Ça promet.
Pendant ce temps, j’ai un peu l’impression d’un essoufflement du blogging des politiques. Sont-ils dans l’attente d’un renouvellement du modèle et de son utilisation ? la vogue du podcast semble avoir fait long feu, il est vrai que cet instrument est mal utilisé.
Toujours est-il que je ne peux m’empêcher de faire le lien avec ce qui se passe sur le DesirsDavenir de Ségolène Royal.
Versac était circonspect au départ, moi aussi. Ce site à l’identité éthérée, avec ses questions sans point de vue de départ, était un peu de l’anti-blogging.
Trois mois plus tard, il y a quand même eu quelques 7000 contributions (vu la taille de certaines, on est loin du concept de commentaire). Maintenant, nous avons droit à une une synthèse, avec citation de contributeurs, puis à ce qu’en pense Ségolène Royal. Chacun peut déconstruire et critiquer puisque les sources sont disponibles. On sait déjà que tout cela accouchera d’un livre, le premier chapitre peut d’ailleurs être commenté, il y a déjà 1000 réactions ! Les droits d’auteurs seront-ils partagés ? les contenus sont sous Creative Commons, ça aussi c’est intéressant.
Constatons donc simplement que Ségolène Royal, en transposant en ligne un modèle basique de débat, a trouvé le moyen de tirer profit de l’appétence interactive de nos concitoyens à s’exprimer. Certains ne se privent pas de dire qu’ils font son boulot, mais après tout, l’expérience démontre l’existence sur Internet d’une nouvelle modalité de participation politique en France.
Cela n’est évidemment pas sans bousculer la manière habituelle dont un projet politique se constitue, à savoir par l’affirmation d’un projet appuyé sur des convictions. À ce titre, le blog restait classique, la nouveauté résidant sur le fait de permettre l’échange direct. Ici, on construit le projet par la participation, ce qui n’est évidemment pas sans créer de la responsabilité sur celui (celle en l’occurrence) qui s’en sert et poser la question de la fixation du projet personnel le moment venu. C’est une des deux questions que pose fort justement Michel Moine, avec celle qui consiste à s’interroger sur le rôle du parti dans cette affaire et sur la question de la représentativité que tout cela renvoi. Ça ressemble fort à un bouleversement.

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